Le Soir Magazine (fr)

Deux fois Phil Abraham

Du même coup, deux cd du tromboniste et vocaliste Phil Abraham ont atterri dans la boîte aux lettres. Cela ressemble à une aimable attention du Père Noël, avant qu'il ne regagne ses pénates enneigées. Dans "Surprises", le talent de chanteur d'Abraham - inspiré de Chet Baker et Mel Tormé - nous transporte littéralement par un sens aigu de la justesse. Cette caractéristique se récupère intacte dans son jeu de trombone somptueux. On pense à un vers de Tristan Tzara : "Des rideaux glissent de grandes larmes". Faire pleurer son instrument, tout en préservant un son d'allégresse, constitue la marque d'épanouissement d'un talent rare.
Voué à la musique des Beatles, l'autre CD de Phil, avec une magistrale entrée en matière de Charles Loos sur "Eleanor Rigby", nous restitue de Lennon et McCartney, l'impertinence griffue, une souriante intelligence dans le traitement des thèmes alliée à une plaisante désinvolture. L'amusante photo au dos de l'album rappellera aux fans des Beatles leur constante originalité. Un seul regret : on n'entend pas assez Jacques Pirotton. Avec une discrétion déboussolante, il s'affirme comme notre guitariste le plus constamment inspiré. Une musique qui fait s'arrêter le temps.

Marc Danval